Je grimpai quatre à quatre les marches menant au toit. L'endroit était suffisamment peu fréquenté pour pouvoir être seule, avec un peu de chance, même si la dernière fois que je m'y étais isolée était la fois où j'avais presque saboter mon histoire d'amour.
Les conditions étaient si semblables. Moi, assise contre un mur, les joues couvertes de larmes et une lettre froissée dans la main. Une lettre de ma mère, encore une fois. Une lettre qui m'annonçait la nouvelle qui n'aurait jamais dû me parvenir. La nouvelle qui ne pouvait être réelle.
Mon père était mort quelques semaines auparavant.
Ma mère avait attendu avant de me le dire parce qu'elle ne savait pas comment l'annoncer, parce qu'elle espérait que l'annonce deviendrait moins réelle avec le temps. Parce qu'elle espérait que les autres choses qu'elle avait à m'annoncer s'effacent en attendant.
Elle avait fini par m'écrire. Je tenais dans ma main les derniers jours de mon père, son aventure avec la mère d'Astrid... Et surtout, mon statut de princesse de Vailin.
Ainsi, j'aurais donc fini par l'apprendre d'une manière ou d'une autre. Rencontrer Astrid moi-même n'avait été qu'une manière d'accélérer ce processus. Quoi qu'il se serait passé, j'aurais connu la vérité. Quoi qu'il se serait passé, ma vie serait devenu un enfer.
Un bruit me tira de mes réflexions. Quelqu'un arrivait.

Une jeune fille se pencha vers moi, me demandant quel était le problème. Je mis quelques minutes à comprendre la question et quelques autres à me demander comment réagir. J'appréciais l'attention, mais de la part de quelqu'un que je ne connaissais absolument pas, je voyais plus de l'indiscrétion qu'autre chose. Je finis par lui répondre, beaucoup plus sèchement que je l'aurais souhaité, mais sans regret.

❝ ▬ Rien qui te regarde. Tu es ? ❞

L'adolescente ne bougea pas après ma déclaration. Je ne pus m'empêcher d'en être surprise ; les gens détestaient généralement qu'on soit un tout petit peu méchant avec eux, se vexant très, très facilement. Je ne savais pas si je devais être énervée ou intéressée par son comportement.

❝ ▬ Moi, c'est Alice. Qu'est-ce que tu viens faire ici ? Il fait un peu trop moche pour que tu sois ici juste pour prendre l'air. ❞

Maeva lança qu'elle avait "senti" ma présence ou une connerie du genre. Mon regard se durcit. Je détestais tous ces gens qui avaient une prédisposition à venir fouiner dans ma vie privée, comme Astrid et, apparemment, cette fille. Lorsque je répondis à ses mots, ma voix était d'une sécheresse inimaginable.

❝ ▬ D'accord. Donc, ton passe-temps, dans la vie, c'est espionner les gens, c'est ça ? ❞

L'adolescente tenta d'expliquer plus précisément ce qu'elle faisait, histoire d'avoir l'air moins méchante. D'une certaine manière, elle avait l'air vraiment... presque sympathique. Je lui adressai un sourire compatissant.

❝ ▬ C'est ma faute, hein ? Ça m'étonne pas. C'est bien mon genre, d'emmerder tout le monde sans le vouloir. Enfin bon, la prochaine fois que je crie de désespoir sur le toit, tu essayes de me laisser tranquille ? ❞

La discussion n'arrêtait manifestement pas d'être ennuyante. Je décidai donc de me replier vers un endroit où je serai plus tranquille et débarrassée de cette fille qui me mettait vraiment mal à l'aise.

❝ ▬ Bon, je pense que je devrais y aller, lançai-je en me levant. A une prochaine, peut-être ! ❞